lundi 15 février 2010

Gainsbourg, vie héroïque


Bien que le titre me fasse tiquer, je suis allé voir le nouveau biopic sur Gainsbourg. C’est vrai quoi, Gainsbourg, une vie héroïque ? Pas convaincu. Rappelons quand même qu’on parle d’un peintre raté à la vie sentimentale et familiale plutôt chaotique, qui ne sait pas conduire mais qui fume comme un pompier et boit comme un curé pour oublier qu’il est compositeur de chansonnettes un tantinet vulgaire, une musique populaire qu’il considère comme un art mineur, rien de plus. Quand aux coups d’éclats comme l’épisode Whitney Houston ou le billet cramé, c’est rien d’autre que de la frime, du flambe pour cacher sa timidité maladive.
Mais il est vrai que plus qu’un héros, Lucien Ginsburg de son vrai nom s’est créé un mythe qui fait fantasmer encore aujourd’hui. Celui du type fascinant qui se tape Brigitte Bardot et compose les deux tubes que sont Bonnie & Clyde et Je t’aime moi non plus dans la même nuit, excusez du peu. Un personnage habité et dalinien, avec ce frère mort-né qu’il est venu remplacer. C’est justement ce que le film de Joann Sfar met en avant, en créant à un Michel Elmosnino très ressemblant un double en papier-mâché qui suit partout notre héros version Bukowski, le poussant comme un mauvais diable vers le succès et la célébrité. Un Gainsbarre-toi dont Serge n’arrive pas à se débarrasser, qui le suit comme une ombre et qui prend la forme d’une caricature de l’image que l’artiste s’est construite, avec un nez qui n’a rien à envier à Pinocchio, et la grosse tête parfois.


On se retrouve ainsi plongé dans l’univers fantastique très bande-dessinée du réalisateur, également auteur de comic strip, avec un Gainsbourg rêvé et des effets à la Michel Gondry, dans la veine du poétique I’m not there sur Bob Dylan, qui contraste avec les biographies classiques sur Johnny Cash, Edith Piaf et autres Ray Charles auxquelles ont étaient habitués. Et si on a du mal à entrer dans l’atmosphère du Paris occupé vu par les yeux d’un gamin juif un peu trop imaginatif, on se laisse vite charmer par l’ambiance paillette des clubs travestis de ses débuts difficiles dans les piano-bars. Puis la rencontre avec Boris Vian (interprété par Philippe Katerine), Juliette Greco et les autres. A ce titre, l’entrée en scène de France Gall, en stupide poupée de cire très fille à papa qui va chanter les sucettes sans comprendre est un petit bijou d’ironie. On retiendra aussi la performance de Laetitia Casta en Brigitte Bardot, avec le même air cruche, mais beaucoup moins celle de la regrettée Lucie Gordon en Jane Birkin, dont l’accent britannique ne m’a pas convaincu.
Et quel plaisir de mettre cet univers merveilleux en musique avec des chansons qui semblent chantées directement par les acteurs, un peu à la manière d’une comédie musicale, qui n’est pas sans rappeler across the universe, romance où les interprètes passent leur temps à chanter les Beatles.


Un film à voir pour découvrir en image les plus belles frasques de ce personnage de génie tout en excès, pour autant qu’on ne soit pas un puriste inconditionnel de l’artiste. Car comme le dit l’auteur : "J'aime trop Gainsbourg pour retracer vraiment sa vie, je préfère raconter ses mensonges". Ou un truc du genre.

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